Qu'ils se payent des républiques Hommes libres! Carcan au cou Qu'ils peuplent leurs nids domestiques Moi je suis le maigre coucou Moi, cœur eunuque, dératé De ce qui mouille et ce qui vibre Que me chante leur Liberté À moi? Toujours seul, toujours libre Ma patrie, elle est par le monde Et, puisque la planète est ronde Je ne crains pas d'en voir le bout Ma patrie est où je la plante Terre ou mer, elle est sous la plante De mes pieds quand je suis debout Quand je suis couché: ma patrie C'est la couche seule et meurtrie Où je vais forcer dans mes bras Ma moitié, comme moi sans âme Et ma moitié c'est une femme Une femme que je n'ai pas L'idéal à moi c'est un songe Creux. Mon horizon: l'imprévu Et le mal du pays qui me ronge Du pays que je n'ai pas vu Que les moutons suivent leur route De Carca**onne à Tombouctou Moi, ma route me suit sans doute Elle me suivra n'importe où Mon pavillon sur moi frissonne Il a le ciel pour couronne C'est la brise dans mes cheveux Et, dans n'importe quelle langue Je puis subir une harangue Je puis me taire si je veux Ma pensée est un souffle aride C'est l'air, l'air est à moi partout Et ma parole est l'écho vide Qui ne dit rien et c'est tout {parlé:} Mon pa**é: c'est ce que j'oublie La seule chose qui me lie C'est ma main dans mon autre main Mon souvenir: rien! C'est ma trace Mon présent c'est tout ce qui se pa**e Mon avenir: demain... demain Je ne connais pas mon semblable Moi, je suis ce que je me fais Le Moi humain est haïssable Je ne m'aime ni ne me hais Allons! La vie est une fille Qui m'a pris à son bon plaisir Le mien c'est la mettre en guenille La prostituer sans désir Des dieux? Par hasard j'ai pu naître Peut-être en est-il par hasard Ceux-là, s'ils veulent me connaître Me trouveront bien quelque part Où que je meure, ma patrie S'ouvrira bien, sans qu'on l'en prie Assez grande pour mon linceul Un linceul encore, pour que faire? Puisque ma patrie est en terre Mon os ira bien là tout seul