La pluie commence à tomber sur les hangars abandonnés Les entrepôts désaffectés, le portail des usines fermées Il laisse les gouttes épaisses tremper ses cheveux et sa tronche Sa clope presque finie lui irrite un peu les bronches Il longe le trottoir en zigzagant entre les flaques Ferdinand Bardamu, c'est pas Eugène Rastignac Là haut sur la voie ferrée qui pa**e par dessus la nationale Un train de marchandise rouillé grince et trébuche sur les rails La pluie est trop forte maintenant pour rester dehors À l angle de la rue, l'enseigne du Bar des Sports Le patron, l'air accablé, lui sert un ballon de rouge Dehors la flotte a redoublé sur les cheminées couvertes de rouille Il croise les mains et les fout sur la table La toile cirée pleine de vieilles taches d'alcool et de cendres Il n'a pas demandé cette vie minable Il faudrait plutôt penser à essayer de se reprendre Mais il sait pas au juste quel est son rôle Des les zones périphériques du bourbier urbain Complètement paumé dans les Années Folles Et les longs couloirs du métropolitain Il laisse une pièce mais pas de pourboire Et sort avec des yeux hagards Il longe un moment un grand mur Le dos fouetté par l air du soir La pluie brusquement s'est arrêtée de tomber Il n'est pas très tard les fumées des cheminées sombres Se mêle aux nuages noirs qui pèsent sur l'air pollué Les bâtiments géants font des immenses taches d'ombre Il marche le long du mur un peu nerveux Pourtant à vrai dire il ne pense plus à grand chose Les mains dans les fouilles de son imper' douteux Il regarde vaguement le paysage morose Son pa**é est vague comme ses terrains vides Qui s'étendent a perte de vue Entre les vieilles usines Sa gueule devient encore plus livide Que les façades déglinguées des entrepôts en ruine