Ovide - Les métamorphoses d'Ovide, Livre I (Fable 3) lyrics

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Ovide - Les métamorphoses d'Ovide, Livre I (Fable 3) lyrics

(v.89) L'âge d'or fut le premier âge de la création. En l'absence de tout justicier, spontanément, sans loi, la bonne foi et l'honnêteté y étaient pratiquées. Le châtiment et la crainte étaient ignorés ; on ne lisait pas sur les murs, des menaces gravées dans le bronze ; et la foule suppliante des plaideurs ne tremblait pas devant le visage de son juge : sans justicier, tous étaient en sûreté. En ce temps, le pin, coupé sur ses montagnes, n'était pas encore descendu jusqu'à la plaine liquide, pour ses pérégrinations à travers le monde, et les mortels ne connaissaient d'autres rivages que les leurs. En ce temps, les fossés à pic ne ceinturaient pas les forteresses. Ni le tube d'airain allongé de la trompette, incurvé du cor, ni les casques, ni l'épée n'existaient. Sans recours au soldat, les peuples, en sécurité, poursuivaient leur existence douce et paisible. La terre elle-même, aussi, libre de toute contrainte, épargnée par la dent du hoyau, ignorant la blessure du soc, donnait sans être sollicitée tous ses fruits ; satisfaits d'aliments produits sans nul effort, les hommes cueillaient les baies de l'arbousier et les fraises de la montagne, les cornouilles et les mûres adhérant aux buissons épineux, et les glands tombés de l'arbre touffu de Jupiter. Le printemps était éternel, les tranquilles zéphyrs caressaient de leur souffle tiède les fleurs nées sans semence. Bientôt même la terre, sans l'intervention de la charrue, se couvrait de moissons, et le champ, sans aucun entretien, blanchissait de lourds épis ; c'était l'âge où coulaient des fleuves de lait, des fleuves de nectar, où le miel blond, goutte à goutte, tombait de la verte yeuse. (v.113) Ensuite, lorsque Saturne eût été précipité dans les ténèbres du Tartare, et que Jupiter fut le maître du monde, ce fut le tour d'une génération d'argent, d'un prix moindre que l'or, mais plus grand que le bronze aux reflets fauves. Jupiter réduisit la durée du printemps d'autrefois, et, avec l'hiver, l'été, le capricieux automne, et le printemps écourté, régla en quatre saisons le cours de l'année. C'est alors que, pour la première fois, l'air, à la flamme des souffles desséchés, s'embrasa, que, congelées par la bise, s'allongèrent les stalactites de glace. C'est alors que, pour la première fois, les hommes se réfugièrent dans des demeures ; et ces demeures furent des grottes, des buissons touffus, des abris de branchages reliés par de l'écorce ; pour la première fois, les semences, dons de Cérès, furent enfouies dans les longs sillons, et le poids du joug fit gémir les jeunes taureaux. (v.125) A cette génération en succéda une troisième, de bronze, de tempérament plus rude, plus prompte à recourir à l'horreur des armes, ignorant cependant le crime. La dernière fut de fer, dont elle a la dureté. Du coup, ce fut l'invasion, dans un âge d'un pire métal, de tout ce que réprouvent les dieux, la déroute de l'honneur, de la franchise, de la loyauté ; à leur place s'installèrent la tromperie, la ruse, le piège insidieux, la violence, le criminel appétit de la possession. Le navigateur ouvrait ses voiles aux vents, sans bien les connaître encore ; et les pins, si longtemps dressés sur les hautes montagnes, devenus navires, bondirent sur des flots inconnus. Le sol, jusqu'alors bien commun, comme la lumière du soleil et l'air même, fut, par le défiant arpenteur, marqué du long tracé des limites. Et ce n'est pas seulement des moissons et une nourriture légitime que l'on exigea de la richesse de la terre, mais on pénétra jusque dans ses entrailles ; et les trésors qu'elle avait enfouis et cachés jusqu'au voisinage des ombres du Styx sont arrachés de ses profondeurs, sources empoisonnées de tous les maux. Le fer malfaisant, et plus malfaisant encore que le fer, l'or, en étant extraits, avec eux en sort aussi la guerre, qui use de l'un et de l'autre pour combattre et qui, de sa main teinte de sang, entrechoque les armes bruissantes. On vit de rapt ; l'hôte n'est pas en sécurité auprès de son hôte, ni le gendre auprès de son beau-père ; entre frères mêmes, la bonne entente est rare. L'époux est une menace pour la vie de son épouse, l'épouse pour celle de son mari ; les redoutables marâtres mêlent aux breuvages les livides poisons ; le fils devançant la date fatale, complote contre la vie du père. La piété gît vaincue, et, la dernière des hôtes célestes, la vierge Astrée a abandonné la terre ruisselante de sang.

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