Jacques Bertin - Béatitudes lyrics

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Jacques Bertin - Béatitudes lyrics

Heureux ceux qui ont un cœur de pauvre! Heureux les purs, les candides Les désintéressés, les bienveillants aux mains ouvertes, ceux Qui ont cru toutes ces histoires, leur silence est comme un feu Leurs cœurs sont des barques glissant sur le fleuve du devenir Heureux les idiots, les perdus, tous ceux qui ont une âme épaisse Ils ont des battements des paupières comme des nids où naissent Des constellations de larmes, des déflagrations d'oiseaux Et ce n'est pas rien d'être dans sa tête le maître des eaux! Heureux les poètes mauvais avec leur grosse âme qui saigne Heureux l'amuseur qui ne fit pas rire, l'acteur maladroit Ils seront Saint-Jean Bouche d'or dans mon beau pays sous les treilles Ils gouverneront les dimanches bleus l'abbaye des abeilles Heureux ceux qui restent fidèles longtemps à leurs souvenirs Trop longtemps, comme à un bien de famille qu'on ne sait pas vendre Ils tiennent par le bout des doigts le fil qui mène à l'avenir Nous porterons nos grains au moulin sombré où ils nous attendent Heureux celui qui aime au delà des lignes, les bouées, la barre Au delà des années perdues, là où les bêtes ne vont pas Le bateau figé dans la mer, traînant un nom comme une amarre Et, au lieu de mettre à la voile, qui pour l'étoile chanta Celui qui va dans le malheur comme dans un taillis énorme Et qui grandit à chaque pas, laissant de sa chair aux ronciers Qui monte au ciel par le sentier de ses erreurs, oui, comme un homme Ou dans sa tête dresse sa détresse comme un espalier Les femmes qui ont trop travaillé, trop pleuré, leurs doigts trop lourds Celles qu'on n'a pas voulues, leurs doigts sans bague dessineront L'île du Pacifique pour l'aventure unique et l'amour Où j'ai décidé que pendant dix mille ans elles aimeront J'ai entouré de fleurs des champs les parents des petits débiles Les veuves aussi des mineurs qu'un soir on a laissés au fond Les fiancées des blessés qu'on n'a pas pu ramener en ville Et qui sont morts dans les marais perdus où ils tenaient le front Heureux ceux-là qu'on a choisis pour les missions trop difficiles Pour les paris désenchantés qui ont fait un pas en avant Ils sont entrés dans nos refrains qui sont des corsages de filles Et heureux soient-ils car ils dureront ce que durent les chants Soyez heureux, vous tous! Vous êtes l'antique cité des hommes Et vous avez fait des merveilles et semblez ne le savoir pas Et vous vous méprisez et vous interrogez sur vous, sur l'Homme Au lieu d'aller dans les remous et de désirer les combats Soyez heureux! Voici le jour, le vieux matin, l'intelligence L'amitié soit votre richesse et tout le pain et tout l'été Regarde: Un homme t'apostrophe, il est superbe, il est immense Or il cherche un lieu dans l'hiver et c'est en toi qu'il veut loger Heureux celui qui chante l'Homme avec ses propres mots, ses larmes Et avec les armes de l'homme qui s'évertue à chanter Heureux l'homme que soudain un vers d'un poème fait pleurer Puisqu'ainsi s'ouvre le royaume où l'on chante, on saura aimer Celui qui chante sans espoir et seul, il sera consolé Heureux celui qui chante sans espoir! Il sera consolé Celui qui fait de son malheur une chanson, car ce mystère Sera compté à son crédit peut-être et qui sait, chanté dans les rues du ciel!

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