[Syrano]
Il ne donne plus de nouvelles, a fait le deuil du départ
Il a tranché ses racines pour mieux pousser autre part
Il a des hématomes à l'âme mal soignés, des traces
Aux poignets qui plongent leurs liens dans l'anonymat
Comme des corps oubliés dans un charnier
Il a décidé de sauver ce qui était encore épargné
Pour se soigner, il a nettoyé chaque plaie
Vomi chaque coup, s'en est allé brûler les chapelets
Quand on bat son fils, il n'y a pas d'astuce
Et la Bavaria ne peut servir d'excuse
Si on l'élève sans le toucher que du bout de lanières de cuir
On ne s'étonne pas qu'à 12 ans, il pense à fuir
Et si on lui avoue qu'il n'était pas désiré
Il ne restera qu'un silence à déchirer, une entaille dans la toile cirée
Non, il ne connaît pas le pardon
Car on choisit où on arrive même si jamais d'où nous partons
[refrain]
Tout me touche alors je laisse pa**er le jour
Entre nos mains. Entre vos cœurs et le mien
Ma peau est douce et la vôtre est sûrement de velours
Mais excusez la pudeur qui me retient
Il grandit donc isolé, pas éduqué mais dressé
Tellement loin du monde qu'il s'y sent oppressé
Alors il dessine et décrit ce que son esprit
Capte des alentours, cherche de la tendresse
Trop tôt, découvre les caresses, les amours épistolaires
Précoce et solitaire, se terre dans son échec scolaire
La Lune comme astre solaire, il se réfugie dans l'art
Car, à la lumière des autres, il voyait moins sa bougie
Jamais il ne dérape. Il évite la thérapie
Adapte la maîtrise de soi apprise au karaté, puis
Frappe la scène par sa répartie
Voilà une chance qu'il ne peut pas rater
Pour mettre son pied au cul du destin
Et résorber les lames logées dans ses intestins
Il cherche à prouver qu'il existe en étant reconnu
Tellement mal dans sa peau qu'il se met chaque soir à nu
[refrain]
Arrive la vie, l'envie de raviver l'enclave
Il se réveille un jour, ravi et de nouveau esclave
Se marie vite comme pour rattraper le temps
Mais, quand le bonheur pointe, une lame l'entrave
L'élue s'avère plus sévère que le pa**é
Elle est venue amère avec son lot de poisse
Et repart en laissant des draps froissés, de la vaisselle ca**ée
Et une trace faite au couteau sur son bras
La route est ainsi faite que l'on croise, parfois, deux fois
La même histoire à deux différents endroits
Cela le conforte dans l'idée résignée
Que la distance est utile et toute désignée
Pour préserver le vide autour de chaque individu
Il se dit que, peut-être, l'humain est ainsi conçu :
Chacun son espace. Etriqué. Infini
C'est ainsi que tout finit et que tout continue
[refrain]
Il ne donne plus de nouvelles. Il fait le tour du globe
Avec, dans ses valises, encore un peu de ses phobies
En quête de paix pour redorer son piédestal
Il écrit des cartes postales au pa**é
Il voudrait s'installer, faire mentir ce qui nous détermine
A reproduire éternellement le schéma comme des termites
Sa mémoire sature de souvenirs aiguisés
Il fait ceinture et paye son calme en petites coupures
Il s'achète une vie d'ascète, presque rigide
Et, dans la privation, trouve le salut sans guide
Jusqu'au soir d'août où il confiera ses doutes
Racontera l'histoire tout entière bien qu'il en coûte
Elle écoutera puis il goûtera ses lèvres
Comprenant alors qu'il importe peu d'être célèbre
Tant qu'une seule sait lui donner de la valeur
Et que si le monde entier est froid, elle lui offre sa chaleur
[refrain]
Je vous effleure seulement
J'aimerais mériter le monde mais lui ne me mérite en rien
Je vous effleure seulement
J'ai la timidité du pin