[Couplet 1 : Ekoué]
Chaque cellule de son corps est le théâtre d'une guerre civile
Les années noires de son adolescence défilent
Regarde ta soeur comme elle grandit
Les murs décrépis du quartier lui parlent comme ils t'ont parlé à l'époque
A l'ombre de ces quelques esprits éclairés bien sûr
Par la lumière des commentaires déjà très anciens
Qui ne les prennent ni en pitié ni pour leur meilleur copain
Comme si le poids des confidences
Cela condamnait au silence puis aux mauvaises influences
Dieu merci, toute la chaleur que témoigne le foyer
Dans cette mer de béton il évitera de se noyer
Depuis le décès soudain de son vieux père trop vite mis en terre
Des suites d'une tumeur au poumon, à tellement respirer l'amiante
Et les vapeurs de goudron de ces rues commerçantes
Rebaptisées à la sueur de ses mains de prolétaire
Ou au volant de ces bulldozers prêts à servir le couvert
De ces entrepreneurs locaux qui auront toujours le dernier mot
Seul avec sa mère et une soeur en bas âge au quatrième étage
D'une tour vieille comme le monde si on en croit le décalage
Qu'il y a entre ce paysage ingrat et le centre-ville
Plutôt bourgeois et aéré, carrément tranquille
Le soir sous les fenêtres, dès que le ton monte
Il te dit avoir une revanche sur la vie
À qui daigne entendre ce qu'il te raconte avec cette part de récit
Donnant du coeur à l'ouvrage, aux pages noircies
De ses trop récents pa**ages dans les parages
Entre nous, en 25 ans de vie de quartier
A côtoyer les mêmes bancs, l'été au bord de l'étang
Au pied des mêmes bâtiments l'hiver, toujours sans grand idylle
A part descendre toute la bière qu'on pourrait trouver en ville
Que reste-t-il ce soir ? A toi de voir mon frère
Avant de rejoindre ton pieu aux premiers coups de barre de fer
Parole d'un témoin oculaire fatigué dont les aveux opiniâtres
Ressemblent étrangement au vieux plâtre de ces murs délabrés
[Refrain : Ekoué]
Le temps pa**e
L'étau se resserre
Et l'oiseau fait sa cage
Construit son nid de pierre
Le temps pa**e
L'étau se resserre
Quand l'oiseau fait sa cage
Construit son putain de nid de pierre
[Couplet 2 : Ekoué]
Jusqu'au jour où les pans de ces murs fissurés
Commencent à parler de travers
Trahissent ses blessures
Définissent les contours de son sale caractère
Ses cris de colère n'engagent que lui
Se confondent aux bruits des grincements d'un engrenage où l'échec scolaire
Enfante des cas sociaux, oriente leurs cas contraires
Vers ces filières pourries considérées comme l'aboutissement
D'une politique de l'emploi précaire
Qui a le mérite d'être claire comme la came
Lorsque qu'elle t'envoie au cimetière des hommes et des femmes
(Quand est-ce que tu vas regarder la réalité en face ?)
J'aimerais aller voir leurs enfants
A ces enculés de cols blancs
Se répète-t-il souvent
Approcher doucement de la trentaine
Sans grigri ni talisman dans ce désert de ciment
Il n'y a que chez les trous du cul
Que cette spirale de la honte vaut la peine d'être vécue
Ceux pour qui l'inculte est d'avant-garde
Ou le culte du grossiste, le parfait exemple de réussite
C'est bien triste
Ses yeux pleurent quand il regarde sous son sombre ciel
L'ombre d'une sage décision
Bombardée par le boucan et les odeurs de poubelle
J'écris son calvaire en poésie
Avec les mots qu'il préfère, me confie sa mère
Et tous les jours je prie
Pour peu qu'il s'en souvienne
Réfrène ses instincts de folie à grand peine
Spectateur de son propre drame
Avant saturé d'aigreur, vient allumer les sirènes d'alarme
Dès que la ville s'endort, comme par hasard
Au crépuscule d'une bavure ou d'un contentieux de pourritures
Cette atmosphère suffocante le déglingue doucement
Quand plus rien ne te distingue d'autrui
Tu t'aperçois comme ce monde est petit
Non seulement tu croises des seringues dans les aires de jeux
Mais la flemme partout dans notre système nerveux. Tu me diras que
Toute volonté trouve son chemin si tant est qu'elle soit
Couronnée par un de ces plans de carrière d'ouvrier comme papa
Il le sait, il en souffre, putain
L'ingurgite trop vite sans digérer ce qu'il bouffe
Jusqu'à ce qu'il s'étouffe à l'agonie
Recrache son mal de vivre à la figure de n'importe qui
Les railleries des commères parleront de drogue dure (ben voyons)
Et les rumeurs les plus folles iront jusqu'à dire
Que désormais, il court derrière les pigeons
Dehors en caleçon, il se tape des barres de rire seul
Dans son bien triste délire et puis il tire la gueule
En se gardant de toute explication
Car la démence arrive
Par vagues successives et s'estompe
Bref, encore un légume de plus dans le potager
Pourri par le temps
Ecrasé par le poids de l'échec et les pierres contagieuses des murs
De ces putains de bâtiments