LA nation française qui a, de tout temps, poussé très-loin l'armour du merveilleux, devait accueillir avec une grande faveur les prophèties de Michel Nostradamus lorsqu'elles furent mises au jour. En effect, les premières éditions qui parurent de ce livre furent enlevées en quelques mois; aussi, beaucoup de libraires-imprimeurs de nos bonnes villes de France reproduisirent ce fameux livre, et toujours avec un égal succès. Cela rriva non-seulement du vivant de l'auteur, mais encore après sa mort, ces prophéties ont été réimprimées tant de fois, que parmi les livres de cette époque, on peut dire que pas un seul n'a obtenu une vogue aussi considérable; et aujourd'hui, malgré la grande quantité d'éditions qui en existent, elles sont toutes aussi rares que recherchées.
Nus n'avons pas à décider si c'était un ambitieux ou un cerveau fèlé que Nostradamus. S'il avait rèvé la célébrité, la fin a justifié les moens, son nom est présent à l'espirit de toutes les personnes qui possèdent un grain de superstition, et les nombre en est grand aujourd'hui encore.
De même que l'œuvere de Nostradamus a eu beaucoup d'admirateurs, elle 'a nécessairement amené quelques écrivains à réfuter ses dires, comme elle en a poussé d'autres à les justifier, a parfois permis à ces derniers de faire des rapprochements qui ont dû étonner les esprits forts.
Il a bien fallu, pour arriver à donner un sens à ces fameux quatrains, transporter des dates, refaire des mots avec des mots, mais de quoi ne s'avisent pas des aenthousiastes? et aussi, avec cette méthode, est-on arrivé à faire dire bien des choses à Nostradamus : il avait annoncé la chute de Louis XVI, la Révolution, l'Empire, peut-être bien 1848! Napoléon III! voire même la vapeur, l'électricité, la navigation aérienne! Nous ne doutons pas qu'un jour ou l'autre, un zélé partisan ne découvre les quatrains où matire Michel Nostradamus nous aura fait pressentir ces grandes choses.
On nous pardonnera, nous l'espérons, une seulle citation : Centurie IV< quatrain LIV.
Du nom qui oncques ne fut au Roy Gaulois,
Jamais ne fut un foudre si craintif,
Tremblant l'Itale, l'Espaigne & les Anglois.
De femme estrangiers grandement attentif. Un sieur Guynaud en donna en 1710 une explication qu'un auteur moderne n'a pas manqué de reproduire en y plaçant les noms de Napoléon Ier et de Joséphine.
Toujours est-il que si nous offrons aujourd-hui au public une réimpression de ce célèbre ouvrage, nous n'entrendons pas par là augmenter les rayons du soleil, et, en propageant ce livre, le répandre comme une lumière; nous l'avouerons bien sincèrement, nous ne voulons que reproduire un ouvrage curieux, laissant aux uns leur crédulité toucahnt les choses surprenantes, aux autres leur innocent plaisir de trouver un sens dans un des quatrians de prophète, comme s'ils avaient à expliquer un ràbus, et cela, nous en avons la conviction, ne devra pas tirer à consequence.