Alors ce serait toi, mon vieux copain de route
Au coin du feu, déjà tu te vois tricotant
Racontant mes erreurs et mes frasques sans doute
À un tapis de laine rond de petits enfants
Tu serais la dernière, la vraie, la der des der
Parce qu'il est trop tôt ou bien qu'il n'est plus temps
De pa**er mon bel âge à sauter les barrières
Ou d'aller voir les filles un peu de temps en temps
Tu serais la dernière et déjà ton visage
Se prête à des regards, à des airs languissants
Et au masque élégant quelquefois du veuvage
Comme ces veuves-là ont un air séduisant!
Tu serais la dernière, ma vraie, ma mie, ma veuve
Je rêvais d'en avoir jadis plus de deux cents
Mais les plus aguerris, au fond, font ce qu'ils peuvent
Trois petits tours de lit déjà ils ont cent ans
Tu seras la dernière, allons, je te l'accorde
Et tu me conduiras le jour de mon gisant
Car je sens sur mon cou déjà peser la corde
Et je ne suis qu'à toi, j'essaierai simplement
Moi, d'être le dernier, de te marquer au rouge
D'être aussi bien l'amant au lit que le linceul
Pour qu'au fond de ton cœur jamais plus rien ne bouge
Le jour, qu'au fond du trou, on me mettra tout seul