C'est tout au fond du Père-Lachaise
Dans la section quatre-vingt-seize
Qu'elle a trouvé son dernier nid
Entre le mur des Fédérés
Couvert de roses et le carré
Maudit de Modigliani
C'est ici son premier repos
Ici que Théo Sarapo
Dort dans la cage de ses ailes
Si la tombe paraît petite
C'est qu'il fallait trop de granit
Pour qu'elle soit à son échelle
Général au buste pompeux
Qui ne t'excuses plus du peu
C'est du marbre sans épitaphe
C'est la plus petite des tombes
C'est celle d'un moineau dont l'ombre
Couche ton grand cou de girafe
Non rien de rien sur les épaules
Elle hante un curieux music-hall
Les feuilles des arbres la bissent
Chrétien, accorde à ton roi
Un jour la permission de croix
Pour que ces deux mains l'applaudissent
Un faisceau de lune lointaine
Un dernier projo sur la scène
Molière l'écoute chanter
Un cimetière, c'est un théâtre
Dans les rangées écoutez battre
Le coeur gros de l'éternité
Sais-tu comment font les artistes
Pour ne pas rendre la mort plus triste
Qu'un "au revoir" au bord d'un quai ?
Suffit que l'amour ait un hymne
Des millions d'amants anonymes
Viennent y planter leur bouquet
C'est tout au fond du Père-Lachaise
Dans la section quatre-vingt-seize
Qu'elle a trouvé son dernier nid
Madame Lamboukas Edith
Dite "Piaf" dans l'ombre maudite
Du peintre Modigliani