Je suis né des brumes du Nord
Où les bateaux jusqu'au vieux port
Comme des ombres s'acheminent
Vers les pignons qui s'illuminent
Flambants comme des ostensoirs
Quand tombe le baiser du soir
Je suis né des brumes du Nord
Où dans un antique décor
Les silhouettes des beffrois
Se mirent tout comme autrefois
Dans le miroir vert des eaux mortes
Que le vent d'automne emporte
Je suis né des brumes du Nord
Où les marchands et leurs trésors
Se déplacent par tous les temps
Sur les marchés de Liège à Gand
En débitant leur boniment
Sous leurs échoppes de drap blanc
Je suis né des brumes du Nord
Où les enfants craignent encore
Les sortilèges des sorcières
Quand le vent hurle sur les terres
Où les vieux font signe de croix
Avant d'entrer dans l'au-delà
Je suis né des brumes du Nord
Où sur les canaux dès l'aurore
Des chalands glissent lourdement
Tandis que leurs moteurs ronflants
Qui vibrent d'un bruit monotone
Battent comme des métronomes
Je suis né des brumes du Nord
Où de verdoyants miradors
Surplombent le lit des rivières
Couchées dans leur lit millénaire
Et qui s'écoulent lentement
Traversant les villes et les champs
Je suis né des brumes du Nord
Où s'épanouissent encore
Quelques roses d'une mutation
Elles se voudraient roses mystiques
Dans un parc aristocratique
Je suis né des brumes du Nord
Où se battent au corps à corps
Les blés jaunis par le soleil
Quand le vent du Nord se réveille
Et que les corbeaux pris de peur
Vont cacher au loin leur frayeur
Je suis né des brumes du Nord
Où les oiseaux volent encore
Dans le ciel voilé de septembre
Tournant en rond, semblant attendre
Le courant qui les conduira
Loin du premier baiser du froid